Janry, l'amour et l'amitié !

Avec la disparition de Philippe Tome en 2019, tu as perdu non seulement ton scénariste, mais aussi un ami. Comment trouver la force de continuer ?

Je me suis posé la question un temps. Puis j'ai trouvé l'envie en moi. Récemment, j'ai réécouté une longue interview d'Albert Uderzo, peu après la mort de René Goscinny. À ce moment, il attaquait son album « Le grand fossé ». Il y racontait les questions qu'il s'est posée sur la suite à donner à Astérix. Il avait le choix entre s'associer avec un scénariste champion, avec une forte personnalité, qui aurait pu détourner la série de son âme. Ou continuer seul, en s'appuyant sur l'expérience vécu avec le scénariste disparu. À mon humble échelle, je vais dans cette voie, j'y vais par petites touches, car je pense être un moins bon scénariste que Philippe. Alors, je peaufine beaucoup. Je dois à mon ami d'être à la hauteur ! À chaque fois que j'achève un gag, c'est que je crois fermement que Philippe l'aurait aimé. Avec modestie.

Dans l'histoire qu'on découvre cette semaine, au détour d'une case, tu dessines Spirou adulte. Est-ce que le personnage te manque ?

Il ne manque pas, même si je suis devenu, un peu à mon corps défendant, l'un de ses pères spirituels. J'observe toujours avec attention ce qu'il devient, je lis les nouvelles histoires le mettant en scène. Mais, si demain je découvre un scénario passionnant, j'ai la vanité de croire que je n'ai pas peut-être pas encore dessiné mon meilleur Spirou et Fantasio ! Quand j'étais en charge de leurs aventures, je terminais toujours une planche en espérant faire mieux sur la prochaine évidemment. Mon cauchemar serait de faire une planche parfaite et de ne plus avoir de raison de dessiner le lendemain.